bloody mist [hermès legend]

L'air est empli de coton et je ne vois strictement rien devant moi. Ni derrière ou même sur les côtés d'ailleurs. J'avance à pas de loup, prenant garde aux endroits où je pose mes sabots et à ne pas émettre le moindre bruit. L'atmosphère est tendue, délicate, angoissante. Au loin, un atroce hurlement déchire l'air mais me parvient étouffé. Je souris.

Mais où suis-je ? Nulle part en fait. Je ne connais jamais les endroits où je me trouve. Je préfère rester focalisée sur mon passé, pour na pas l'oublier. Je n'ai pas envie d'oublier. je veux me rappeler chaque détail. Masochiste ? Sans doute, mais j'en ai besoin pour vivre pleinement. Bien que cela fasse de nombreux mois que je ne vit plus que comme un fantôme. Depuis combien de jours n'ai-je pas mangé ? J'ai oublié. Mon dieu ! J'ai oublié ! 3 jours peut être ? Mon ventre cri famine en tout cas. Bon ! Arrêtes-toi cinq minutes pour te remplir l'estomac Hermès. On repartira après. J'attrape une touffe d'herbes que j'ai senti à mes pieds. On ne voit rien avec ce brouillard, et les grognements autour ne m'aide pas à me rendre compte de l'endroit où je suis. De plus, je suis tendue, j'ai peur de tomber sur le monstre qui hurle. Mais déjà, une odeur équine parvient à mes naseaux. Jument ou étalon ? ...

Je continue mon chemin, lentement, doucereusement. Une effluve me chatouille les naseaux. Je me fige. La brume peut me permettre de m'esquiver sans confrontation avec qui que ce soit. Mais le parfum est teinté d'accents reconnaissables, auréolé de peur. Un frisson glisse le long de mon échine. J'ai envie de jouer.
En me fiant à mon odorat, j'oblique vers la présence et ne m'immobilise que lorsqu'elle ne se trouve qu'à quelques mètres. Le brouillard est si épais que je ne devine même pas la moindre silhouette. Donc elle non plus ne peut pas m'apercevoir. J'essaie de me placer dans le sens du vent, afin de ne pas me faire repérer. Satisfaite, je lâche un grognement plus félin qu'équin.

Alors que je me focalise sur l'odeur du cheval qui m'approche, j'entend un autre grognement, plus félin. Ce n'est pas un tigre ! J'en suis sur. C'est un cheval, et d'après la fragrance c'est une jument. Ouf ! Mais pourquoi me grogne-t-elle dessus ? Je m'approche, lentement, jusqu'à enfin percevoir une silhouette. Une jument se tenait là, un sourire carnassier sur les lèvres.

-Bonjour ! Vous allez bien ?

Et merde. Je me suis fait capter. De frustration je plaque mes oreilles contre mon crâne. Mon jeu est déjà terminé ? Peut-être pas. D'un mouvement fluide, je disparais de nouveau dans le brouillard. J'aime cet endroit. La dissimulation y est tellement facile. De plus l'atmosphère est à la fois inquiétante et pesante.
Je trace un arc de cercle, revient sur mes pas. A présent, la femelle est dos à moi, j'aperçois les contours de sa croupe. Je m'en approche, frémissante, l'effleurant une fois qu'elle se trouve assez proche afin de la surprendre. Et puis je me dérobe une nouvelle fois.
Je veux qu'elle ressente la peur, la vraie, qu'elle observe les alentours de tous côtés, qu'elle se demande par où je vais apparaître ... Que son rythme cardiaque s'accélère, que le stress la fasse vaciller, qu'elle doute sur la véracité de mon être ...
C'est plaisant. Et très drôle.

Mais que fait-elle ? Elle s'éclipse de nouveau dans le brouillard, se fend d'un bond sur le côté, tout ça dans un silence pesant seulement ponctué par des grognements. Mes deux oreilles pivotèrent vers l'arrière. Je n'ai aucunement confiance en ce qui se passe. La jument tourne autour de moi, je l'entend, mais je n'arrive pas à suivre ses mouvements. On dirait un fantôme, comme moi. La condensation me gène, je ne sais plus où je suis, où elle est. J'ai cette sensation de tension constante qui me pèse. Mon rythme cardiaque s'accélère. Aurais-je peur ? Pas encore. Juste du stress car je ne contrôle pas la situation. Soudain, une chose effleure mon arrière-main. la jument, sans aucun doute. Je sursaute, ne m'attendant pas à un contact derrière. Je me retourne.

-Qu'est-ce que vous voulez ? dis-je d'une voix assurée, pour le moment.

Je sens que mon esprit change. Je n'ai plus peur, mais je suis en colère. Je n'ai pas envie qu'on m'embête aujourd'hui. Je ne lui ai rien fait, alors elle n'a pas à s'amuser comme ça avec moi. Sans attendre, je soupir et commence à m'éloigner. Je ne veux pas rester avec cette étrangère.

Je me délecte de cette tension qui alourdit l'air, j'aime l'adrénaline qu inonde mes veines, j'aime être indétectable et insaisissable. Je glisse, je joue avec la brume, je suis la brume. Ma robe a beau être brune, elle se fond parfaitement dans l'environnement. Je ne lui réponds pas. Elle ne mérite pas que je lui réponde. Je souris, ricane. Mes pupilles flamboient d'une lueur malsaine. Je suis en forme ce soir.
Elle se déplace, elle veut fuir. Je disparais, quelques minutes. Je veux lui donner l'illusion de mon départ.
Et puis brusquement, je prend le galop. Rapide, légère et silencieuse. Je contrôle chacun des mouvements de mon corps. Et puis j'ai l'inconnue dans mon champ de vision, au dernier moment. Je lui rentre dedans, délibérément. Avec force et avec puissance. J'aimerais qu'elle trébuche. Ou mieux, qu'elle chute.
Je me retire, mais j'observe.

Enfin, je l'entend qui part. Bien, je vais pouvoir me reconcentrer sur autre chose. Mon fils ? Comme d'habitude. Je me retransforme en spectre. Mais soudain, on me rentre dedans. La jument encore. Ma peur revient. Est-elle complètement folle ? Je me retourne, la cherche. Une certaine colère me prend. Je sens qu'elle va pas m'embêter longtemps la demoiselle.

Le feu court dans mes veines. Un rictus malsain ne quitte jamais mes veines. Une lueur jouissive brille dans mon regard.
Cette nuit là, je ne suis pas vraiment moi. Je suis quelqu'un qui se délecte de la panique, de la frayeur et de la colère. Mais ... ce n'est pas vraiment moi. C'est quelqu'un d'autre, qui m'aide à survivre. Un peu.

Elle ne tombe pas. Dommage. Je tourne autour d'elle, prédatrice. J'observe ma proie. J'attends, que les émotions montent en elle. Qu'elle ne se contrôle plus tout à fait.
Comme moi.

Je la sent. Elle tourne autour de moi. Et une colère nouvelle me prends. Je ne veux pas me battre, et pourtant, j'en ai l'envie, le besoin presque. Ce n'est pas moi qui me contrôle, c'est elle pour l'instant qui joue avec mes nerfs. Je respire fortement, je sens que je chancelle, que je tombe dans son filet. Je me concentre, écoute attentivement où elle passe exactement. Là ! Elle est là ! A ma droite, un petit en face. Reflexe : Je lui saute dessus, et nous tombons toutes deux à terre. Je la coince contre le sol et me mets à gueuler malgré ma voix faible et trop douce pour cela.

-C'est qui qui joue maintenant hein ?!

Ce n'est pas moi, mais impossible de me reprendre. J'ai envie de jouer moi aussi, à ce jeu malsain ...

C'est injuste. Elle ne peut pas me faire chuter lorsque moi je n'ai pas pu. Alors que je m'y attendais et que je me tenais prête, prête à combattre. Et pourtant. Nous nous retrouvons au sol, elle sur moi, et je ris. Sinistre. Au dessus de moi, sa gorge. Je tends l'encolure telle un serpent et j'attrape la chair tendre. Je plante mes dents profondément, je sens le goût du sens. Et mes iris flamboient.

Je sui elle, et soudain, elle attrape ma gorge. J'étouffe. Je n'arrive pas à me détacher d'elle. J'eassaye de reculer, sans résultats. Alors je me mets en appuie sur mes quatre pattes de chaque côté de son corps puis soulève mon antérieur droit. Je le lui balance en plein dans la mâchoire, ou le nez peut-être. Mais sens devienne flous. je ne vois pas bien ou elle est. M'a-t-elle lâché ?

[Upinou

]

J'ai l'impression que ma mâchoire explose. Sous le choc, je la lâche en grondant. D'une impulsion décuplée par l'adrénaline, je me dégage brusquement et me jette encore sur elle, la frappant de mes sabots, la mordant dès que de la chair est à portée de dents. Incontrôlable, je n'ai plus conscience de mes gestes. A bout de souffle, je finis par m'éloigner vivement, la dévisageant d'un regard haineux.

Ca y est ... Je me suis battue, maintenant je subit. Malgré le sacré coup d'antérieur que je lui ai balancé, la demoiselle arrive à se jeter sur moi de nouveau et me rue de coups. Je n'arrive plus à la repousser, alors tout bêtement j'attends qu'elle s'arrête. Je protège on visage avec mes antérieurs pour ne pas finir défigurée et j'attend. Soudain, plus rien. Je n'entends que sa respiration démesurée. Alors j'ouvre les yeux et me relève lentement, encaissant la douleur causée par mes blessures. Je la regarde intensément, à la fois apeurée et convaincue que cela ne vaut pas le coup que je recommence à me défendre. Finalement, je ne suis qu'une moins que rien ...

-Beau combat. Mais je crains n'être plus d'aucune utilité pour vous. Au pire tuez moi ! Je n'ai même plus la force de vivre.

Oui je suis lâche. J'abandonne. Alors que nous venons à peine de commencer...

[Mouh ?

]

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